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Rencontre du troisième type

Une rencontre inattendue...

De temps en temps, il me prend l’envie de changer d’itinéraire. Ce matin, en me rendant chez mes parents, j’ai décidé de configurer mon GPS pour qu’il prenne le chemin le plus court. J’ai donc eu droit aux chemins de campagne… Et également à une rencontre à laquelle je ne m’attendais pas !

Ni une, ni deux, j’ai pris la bête en photo tellement je trouvais la situation cocasse. Si la première prise donne un côté mystique, avec les quelques rayons de soleil qui donnent l’impression d’une vache descendue du ciel (ce qui reflète assez l’effet que l’évènement a eu sur moi), la deuxième est tout de même de meilleure facture et permet d’apprécier toutes les qualités bovines de l’animal.
 
L’ouverture vers l’imprévu est une des raisons majeures pour lesquelles je choisis parfois des options inhabituelles lorsque je conduis. Je dois dire qu’aujourd’hui je n’ai pas été déçu ! Ce n’est pas tous les jours qu’on voit des animaux d’une telle taille se promener en liberté… Du moins, en Belgique.
 
En effet, il n’en n’est pas de même partout, et les souvenirs d’une rencontre faite il y a plus d’un an sont remontés immédiatement à la surface…
Quoi, ma gueule ?

Rencontre du deuxième type

Encore un troupeau de yaks... Pris avec un vieil appareil (désolé pour la qualité)

Croiser un troupeau de yaks ou de moutons paître sans clôture au milieu de la steppe… Voilà bien une rencontre d’un type très courant en Mongolie. Il m’a toutefois fallu un temps pour l’apprivoiser. J’ai d’abord été intimidé par ces masses vivantes et imposantes, et ce n’est que petit à petit que j’ai progressivement raccourci mes détours pour contourner ces animaux…

Un jour j’ai osé. En descendant une colline en fin d’après-midi, j’ai rencontré un troupeau qui devait sans doute rentrer au bercail pour la nuit. Se déplaçant comme un seul “homme”, cet insolent voyageur osait remonter la pente en empruntant mon sentier, alors qu’il avait toute la place pour marcher à côté. Mais j’étais armé de mes bâtons de marche (dont on peut entendre les “tics-tics”)… Il n’aurait osé m’affronter et s’écartait donc de moi à mesure que je l’approchais.

Ma traversée de la mer noire (oui… ça tangue un peu) s’est donc déroulée sans encombre, et c’est en sifflotant que j’ai quitté cette marée montante pour poursuivre ma route.

Les Mongols sont largement habitués à gérer ce type de croisement. Ils traversent les troupeaux de chèvres, moutons, vaches ou yaks à toute allure et à grand renfort de cris ou de coups de klaxons. J’imagine aisément que de telles rencontres puissent devenir pour eux des non-évènements.

En revanche, il est bien plus rare de rencontrer quelqu’un. Bien sûr, les troupeaux appartiennent toujours à des nomades. Leur présence est donc signe d’activité humaine. Mais, entre le yak et son berger, il y a loin. Il est impossible de croiser quelqu’un par hasard dans la steppe, où l’on peut voir à des kilomètres. Chaque rencontre avec un être humain est le fruit d’une décision.

Rencontre du premier type

Dans un autre extrême, la Belgique est 150 fois plus densément peuplée que la Mongolie. Voir quelqu’un en se promenant est tout sauf un évènement. On se saluera en se croisant (en tout cas s’il fait beau), et ça s’arrêtera là la plupart du temps. Combien de cyclistes ai-je dépassé ce matin sans y prêter d’autres attentions que celles relatives à la sécurité routière ?

Dans ce plat pays, nous vivons cette expérience de l’anonymat de masse en permanence, que ce soit de manière incarnée ou en ligne. Devenir personne… Voilà un malaise bien connu de nos sociétés contemporaines. Sans être un spécialiste de la question, il m’apparaît évident que la simple densité de population y joue un rôle de premier plan. Le fait de se trouver sur la même route, au même endroit que quelqu’un n’est pas forcément une décision et n’est en général pas une rencontre. Le plus souvent c’est la traduction d’une réalité statistique : nous sommes de plus en plus nombreux.

Passer de cette réalité statistique à la conscience que toutes ces vies humaines racontent toutes autant d’histoires que la mienne demande un éveil de tous les instants. Et ce n’est pourtant pas moins une réalité, elle est simplement rendue difficile à percevoir par la force du quotidien.

Briser l’habitude de temps en temps est donc essentiel. Il ne m’a pas fallu grand-chose : un petit tour en Mongolie il y a un an, et ce matin un simple changement de configuration de mon GPS. C’est vrai, j’ai perdu 7 minutes, vache comprise, par rapport à la demi-heure habituelle. Mais j’ai gagné une bataille dans mon combat contre la routine.

Et je suis sûr que la Mongolie n’est pas un passage obligé. Au final, ce qui compte vraiment c’est que je me suis donné un rêve et que je l’ai vécu.

C’est la recette du guide Maupassant.

Troupeau d'anonymes ou milliers d'opportunités de rencontres ?

Cher membre de l’humanité,

J’espère que pour toi aussi l’anynomat de masse est parfois un poids (mais seulement parfois). Tant que ce sera le cas, c’est que tu cherches à exister. Tout ce que je te souhaite, c’est de vivre cette recherche avec curiosité, envie et paix.